À Washington, des milliers de scientifiques et de citoyens se sont rassemblés devant le Lincoln Memorial pour défendre une science libre et indépendante. Ce 7 mars, lors de la première grande mobilisation du collectif Stand Up for Science, chercheurs et militants ont dénoncé les coupes budgétaires et la censure idéologique imposées par l’administration Trump.
Antonin Audion

Les manifestants brandissent pancartes et drapeaux pour manifester contre les politiques actuelles en matière de science © Antonin Audion
« Science funding makes America great ! » L'inscription, peinte en lettres rouges, sur une pancarte brandie par une manifestante, résume l'esprit de la foule rassemblée devant le Lincoln Memorial, à Washington. Des milliers de personnes se sont réunies pour défendre une science libre et indépendante. Le 7 mars dernier, a eu lieu la première grande mobilisation du collectif Stand Up for Science, en réponse aux attaques répétées de l'administration Trump contre la communauté scientifique et la culture académique. Sur une scène dressée face à la foule, Gretchen Goldman, scientifique environnementale et présidente de l'Union of Concerned Scientists, prend la parole.
« Nous sommes préoccupés et en colère, car les scientifiques jouent un rôle crucial d’information et de pilotage de l’innovation. Lorsque la science est ignorée, censurée, falsifiée, et privée de financement, des vies sont mises en danger », lance-t-elle sous les acclamations d’une foule de doctorants, chercheurs, et professeurs inquiets. « Quand il n’y a pas de fonds pour la prévention des maladies, les gens souffrent. Quand il n’y a plus personne pour assurer la sécurité de notre nourriture, de notre eau ou de notre air, ce sont de vraies personnes qui tombent malades. Quand on interdit la recherche sur des sujets tels que l’accessibilité ou la justice environnementale, des communautés entières sont mises de côté », liste l’ancienne responsable du bureau de la politique scientifique et technologique de la Maison-Blanche.
Son discours, prononcé avec force et conviction, fait écho aux nombreuses attaques portées contre les institutions scientifiques depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche en janvier dernier. Au fil des semaines, son administration s’est employée à fragiliser les agences environnementales et de recherche. La NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration, NDLR), en charge, notamment, de la prévision des tempêtes et du suivi du climat, a été particulièrement visée : un algorithme a recommandé le licenciement de 1 029 employés, soit une coupe drastique de 20 % de ses effectifs.
« Les universités et les professeurs sont les ennemis »
Le vice-président J.D. Vance a déclaré en 2021 « les universités et les professeurs sont les ennemis ». Une rhétorique mise en place au travers d’une stratégie de défiance envers les institutions académiques et scientifiques. Le financement de la recherche est également affecté : l’administration conditionne de plus en plus l’attribution des fonds fédéraux à des critères idéologiques, excluant les projets à cause de la présence de certains mots tels que « crise climatique », « pollution » ou encore « inclusion ».
Cette politique inquiète les chercheurs, qui y voient une véritable tentative de museler la science. « Cette administration attaque ceux qui disent la vérité, qui promeuvent les faits même quand cela ne leur plaît pas. Ils licencient des travailleurs qui sauvent des vies en silence, tous les jours », dénonce Gretchen Goldman. « La désinformation de l’administration Trump avantage les milliardaires et les compagnies pétrolières aux dépens du peuple. Nous avons la responsabilité d’être unis pour la science. Ils ne pourront pas nous faire taire », faisant référence aux accusations de conflits d'intérêt qui entourent l’action d’Elon Musk dans sa mission d’épuration de la fonction publique fédérale.
Professeure à la retraite ou scientifique, des personnes aux profils variés ont participé à la marche pour la science. Le Dr. Toby Horn et le professeur Seth Blackshaw expliquent ce qui les a motivé à se joindre au mouvement.
Mais la mobilisation ne se limite pas aux États-Unis. Tandis que des milliers de manifestants se rassemblaient à Washington, des rassemblements de soutien ont eu lieu dans plusieurs grandes villes européennes, notamment à Londres, à Paris et à Berlin. Des scientifiques et citoyens engagés ont exprimé leur solidarité envers leurs homologues américains, dénonçant une politique qui, selon eux, met en péril les avancées scientifiques à l’échelle mondiale. Des programmes d'accueil de scientifiques exilés ont également ouvert leurs portes aux chercheurs américains.
« Nous ne nous laisserons pas faire », conclut Gretchen Goldman.